Je viens de passer un après midi de bonheur, avec l’espoir renforcé que l’Afrique peut bien se tirer d’affaire, si elle arrive à produire des leaders à la hauteur de ces défis de la trempe de Paul Kagamé. Le « face to face » auquel j’ai eu le privilège d’assister lors d’une séance spéciale du Pan African Youth Conférence, à la quelle il a convié la jeunesse africaine et quelques mouvements panafricains triés au volet, m’a permis de comprendre les tenants et aboutissants de l’odyssée rwandaise. Après avoir subi le génocide le plus désastreusement rapide que le monde n’a jamais connu avec la perte de plus d’un million de rwandais massacrés en cent jours, le « pays des collines » aux airs de brasier , la nuit, est devenu 20 ans après une icône en Afrique aussi bien sur le plan de ses performances économiques que des indicateurs de la gouvernance et du développement humain.
Un sénégalais qui débarque dans ce petit pays bien dirigé est forcément marqué par deux choses : la propreté absolue et l’ordre paisible. Dans ce pays l’ordre et la discipline ne sont pas assujettis à la psychose sécuritaire mais découlent d’une attitude institutionnalisée et d’une conscience individuelle intériorisée par chaque rwandais.
Le pays est revenu de loin depuis le 4 juillet 1994, date à la quelle le front patriotique rwandais (FPR) dirigé par un jeune capitaine trentenaire, Paul Kagamé, s’empara de Kigali et mit fin au génocide des tutsi. Depuis, cette date est commémorée comme le moment de la libération du Rwanda. Depuis, le pays a fait du chemin. Après avoir pris le pouvoir en 2000, Kagamé réussit à reconstruire son pays sans épargner à ses compatriotes le passage aux tribunaux communautaires qui a permis la réconciliation et le pardon dans les villages. Les « Gacacas » ont ainsi traité, entre 2002 et 2012, plus 1,9 millions de cas pendant que la communauté internationale dépensait plus de 2 milliards de dollars pour seulement 60 cas traités.
Dans son effort personnel de reconstruction du pays et de consolidation de l’unité nationale, Kagamé a d’abord réussi à transformer son pays en faisant des anciens frères ennemis tutsis et hutus, les membres d’une seule ethnie : le rwandais.
Entre 2007 et 2011, un million de rwandais sont passés au dessus du seuil de la pauvreté avec un taux de scolarisation avoisinant les 100%. Chaque rwandais aujourd’hui a accès à une mutuelle de santé. Le taux de mortalité due à la malaria et à la tuberculose a baissé de 75% et l’espérance de vie des rwandais a doublé. Pour leur garantir des moyens d’existence durables et renforcer les liens entre les communautés, il a initié des programmes simples et efficaces comme le « Girinka » qui octroi une vache à chaque famille vulnérable.
Kagamé nous a prouvé que dans les moments de grande difficulté, l’Afrique a surtout besoin de grands leaders. Il a su assumer sa responsabilité de patriote et assurer son leadership en commençant par vaincre toute forme de complexe, dominer sa peur dont il a ignoré le sens pendant les moments difficiles, pour faire face au destin de son peuple.
Avec une vision claire, des programmes de développement cohérents et bien conduits, des zones économiques spécialisées, le Rwanda a fini de réaliser sa renaissance, avec la contribution particulière de ses valeureuses femmes. Le pays est en phase de devenir un véritable Hub régional dans le domaine des finances et des technologies de l’Information. Vous pouvez y entrer sans que l’on vous demande de visa, car pour le Président Kagamé, en véritable protagoniste de l’intégration régionale, les africains ne peuvent être considérés comme des étrangers, ce sont des frères !
Conscient que son audace dérange certains de ces pairs et froisse l’orgueil des puissances paternalistes, il veille au grain et prend très au sérieux sa sécurité.car il sait qu’il est attendu au tournant, se rappelant le sort des bonnes références comme Lumumba, Sankara, Nyeréré, Cabral,… Oui, c’est de bonne guerre ! La forteresse inspiratrice doit être protégée, car elle montre la voie qui peut changer le monde !
La personnalité est humble, ce qui l’empêche de donner des leçons à ses pairs comme l’invitent certains jeunes intervenants. Dommage car si l’Union africaine avait prévu des mécanismes de formation par les pairs, j’aurais suggéré l’envoi d’un contingent de présidents africains en stage de gouvernance patriotique au Rwanda. Suivez mon regard ….
Aux jeunes africains à qui il compte passer le flambeau de la lutte de libération, il a posé trois questions majeures que je vous rapporte ici :
1. Etes-vous suffisamment en colère pour changer la situation de l’Afrique ?
2. Etes-vous révoltés face à l’injustice et la condescendance ?
3. Etes-vous dans les dispositions d’utiliser les ressources dont vous disposez pour changer la vie de vos concitoyens ?
J’invite les jeunes africains à considérer ces questions comme des guidelines de leur engagement patriotique pour transformer l’Afrique. Je vous recommande Paul Kagamé comme un rôle-modèle pour vous inspirer.
Kigali le 02 juillet 2017
Elimane Kane