Et si Antoine avait raison ?

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New York, le 3 mai 2021. Le 3 mars 2021, le Sénégal est secoué par de violentes manifestations, suite à l'arrestation de l'opposant Ousmane Sonko, arrivé troisième aux dernières élections présidentielles de 2019. Ousmane Sonko, accusé de "viol et de menaces de mort" par une employée d'un salon de beauté dakarois. Ce que son camp dénonce comme une "tentative de liquidation politique."

Je n'ai pas reconnu l'homo-senegalensis réputé intelligent et non -violent, lors de ces trois jours de manifestation soldés par des affrontements violents entre manifestants et forces de l'ordre; mais aussi des "actes à caractère terroriste, des agressions, des pillages, de sacages de bâtiments publics et de biens privés mais aussi de commerces appartenant à des particuliers et à des sociétés". Au final, on dénombre quatorze pertes en vies humaines et des blessés graves à Dakar et dans les régions.

Si certains expliquent cette révolte des populations d'un point de vue politique en évoquant une tentative de liquidation d'un opposant suite aux cas de Karim Wade et Khalifa Sall. Le premier ayant été jugé et condamné par la CREI (Cour de Répression de l'Enrichissement Illicite) en 2015, le second a été condamné à six ans de prison en 2015 puis gracié par le président Macky Sall après avoir purgé deux ans de prison pour corruption. Les partisans de Sonko ont criés au complot dés le debut de l'éclatement de l'affaire "Sweet Beaty", accusant notamment le Président Macky Sall. Pour d’autres peut- etre par la frustration de la population, en particulier des jeunes, causée par les confinements suite à la pandémie du Covid 19. Depuis plus d'un an, l'économie nationale est à genoux, des milliers de personnes ont non seulement perdu leur emploi mais ont également subi les couvre-feux, les obligeant à rester chez elles, de 20h à 6h du matin.

Cependant je ne pense pas que cela puisse expliquer la violence et la haine observées chez certains sénégalais ces derniers temps. Cette violence est non seulement physique mais aussi verbale. Aujourd'hui, il est presque impossible de donner son avis sur les réseaux sociaux sans se faire insulter ou recevoir des menaces de mort par une armée de personnes qui se cachent derrière de faux comptes. Maimouna Ndour Faye et Maty 3 Pommes ne me démentiront pas.

De plus en plus on voit des tensions un peu partout sur l’étendue du territoire sur des sujets qu'on n'a pas l'habitude de voir au Sénégal. Exemples.

Université Cheickh Anta Diop de Dakar : affrontements entre Ndef Leng et Kékendo. Dans la nuit du 25 au 26 mars, pour une histoire de scooter entre deux personnes appartenant aux deux camps, s'en est suivie une bagarre générale, avec l'utilisation de couteaux et de machettes. Il a fallu l'intervention de la police et une conférence de presse des deux camps pour que la situation se calme. L'un des étudiants, grièvement blessé, est décédé. Une certaine presse, soit ignorante, soit mal intentionnée, a voulu en faire un problème ethnique entre Diolla et Serrer. Deux ethnies fraternelles qui ont toujours entretenu de bonnes relations.

Diohine : une bagarre éclate après un prêche anti-chrétien d'un marabout. Un village mythique de la région de Fatick où chrétiens, musulmans et même animistes vivaient en parfaite harmonie jusqu'à l'arrivée du marabout Serigne Bara Sene il y a seulement quelque mois et voulant convertir tout le village. De nombreuses bagarres ont éclaté entre ses "talibés" et la population qui l'a déclaré "persona non grata" à Diohine. Il a fallu l'intervention de Serigne Cheikh Ndigal Sène, père de Serigne Bara Sene pour calmer les esprits. La population qui réclamait son départ va finalement obtenir gain de cause car Serigne Bara va quitter le village en laissant derrière lui tous ses biens immobiliers.

Entre Djilakh et Ndengler : la tension monte à nouveau. Le conflit foncier entre Babacar Ngom, patron de la Sedima, et la population de Ndengler a pris une autre tournure. Ndengler et Djilakh, deux villages voisins qui vivaient en parfaite harmonie, se disputent une partie des terres qui ont été attribuées à la Sedima. Bilan : cinq blessés dont deux graves, après que des affrontements aient été notés entre les agriculteurs des deux localités, ce lundi 3 mai 2021.

Toutes ces situations tendues constatées dans le pays en un temps record, sur des sujets sensibles tels que la religion, le foncier, les problèmes interethniques, m'amènent à me poser la question de savoir si le Ministre de l'Intérieur (Antoine Félix Diome) n'avait pas raison de dire que nous sommes infiltrés par des "forces occultes". A noter que le gouvernement avait annoncé la création d'une commission d'enquête pour en savoir plus sur les émeutes du 3 mars. Selon, le quotidien “L’Observateur”, du 7 Mai 2021, des notes techniques de la DGRN (Délégation Générale au Renseignement National) montrent que "9.000 comptes Twitter ont accompagné et, parfois, précédé la mobilisation des manifestants sous le hashtag #FreeSenegal".

 

Qui veut brûler ce beau pays réputé stable, communément appelé le pays de la "terangua" ? Pays où le brassage ethnique est envié de partout à travers le monde. Brassage illustré par le cousinage à plaisanterie entre Diolas, Serrers et Peulhs. Pour rappel le Sénégal compte 95% de mulsulmans et a été dirigé pendant vingt ans par le Président -poète Léopold Sedar Senghor dont on raconte encore les excellentes relations qu'il entretenait avec les marabouts notamment Serigne Fallou Mbacke, khalif general de la forte confrérie Mouride. Le Sénégal sera bientôt un pays producteur de pétrole, la malédiction de l'or noir frappe-t-elle, déjà, à notre porte ?

Babacar LOUM

Fadoum.com

 

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